Au Sud Kivu, des acteurs intervenant dans la lutte contre les violences sexuelles se contentent de l’avancée qu’enregistre la proposition de loi d’exemption des frais de justice pour les victimes des violences sexuelles en RDC. En date du 19 mai 2023, cette proposition de loi a été adoptée massivement par les Députés nationaux à l’Assemblée et après et envoyée en seconde lecture au Sénat avant sa promulgation par le Chef de l’Etat.
Du côté de la société civile, c’est un ouf de soulagement pour les victimes et les acteurs des droits de l’homme pensent les organisations de la société civile. Ils encouragent les députés nationaux qui ont adopté cette loi en faveur des vulnérables et victimes des violences sexuelles en RDC.

«C’est vraiment un travail de titan que les députés nationaux ont fait. Ils ont une fois pensé à cette catégorie de personnes vulnérables, de fois sans assistance et sans accompagnement. En tout cas, c’est un ouf de soulagement pour ces nombreuses victimes mais aussi pour le peuple entier qui ne se taira plus devant les actes des violences sexuelles”, se réjouit Héritier Mutimanwa, coordonnateur de Vijana Shujaa.
Ledoux Nkuzimwami membre de la société civile du Sud-Kivu demande au Sénat d’accélérer la seconde lecture pour que cette proposition de loi soit promulguée par le chef de l’État afin de servir les victimes.
“Nous encourageons le Sénat dans la seconde lecture de cette proposition de loi sur l’exemption des frais de justice pour les victimes des violences sexuelles en RDC”, déclare-t-il.
“ Nous demandons aux Sénateurs de ne pas traîner les pas parce que cette loi relève d’un caractère important pour les victimes des violences sexuelles et les acteurs qui les accompagnent. Nous savons que plusieurs victimes se cachent dans des maisons par manque de moyens. Si le sénat arrive à l’adopter vite, c’est une façon de les aider à dénoncer leurs bourreaux. L’importance serait que ces victimes n’auront plus du mal à se rendre en justice faute de tracasseries pécuniaires”, explique-t-il.
“ Nous estimons que les sénateurs ne vont plus traîner les pas, nous leurs demandons de faire de leur mieux pour que le traitement de ladite proposition de loi puisse être accélérée jusqu’à sa promulgation. Nous ne voulons pas qu’elle traine dans le tiroir du bureau du Sénat parce que, c’est une contribution contre l’impunité des cas des violences sexuelles en RDC et pour les victimes que pour les acteurs de la société civile qui interviennent dans la lutte contre les violences sexuelles”, ajoute-t-il.
Des victimes manifestent l’intérêt.
Victime du viol, Cibisim (nom d’emprunt) vivant au quartier Panzi, se dit satisfaite de cette nouvelle loi qui lui aidera à porter plainte contre ses bourreaux qui circulent librement dans son entité.
” Il y a deux hommes dans ce quartier qui m’avaient fait du mal, ils m’avaient tabassé avant de me lier les mains pour me violer, ils m’avaient aussi interdit de ne parler à personne mais j’étais obligé de le dire à certains confidents”, explique-t-elle en sanglots.
“J’ai tenté de porter plainte contre eux, mais ils ont beaucoup plus de moyens que moi. J’étais alors obligé de me taire et de laisser tomber. C’est seulement quand je les aperçois, j’ai tendance à sauter sur eux mais je me réserve seulement. Je crois que c’est déjà une bonne occasion pour moi de dénoncer ces gens si réellement, la justice congolaise va tenir compte de cette loi qui du moins pourra nous aider à surmonter des abus que nous subissons”, pense-t-elle.
Pour Mwambaka du quartier Cikonyi, c’est aussi intéressant d’entendre parler d’exemption des frais de justice car elle a aussi tenté de dénoncer mais sans succès faute de moyen.
«Un garçon m’avait appelé pour le saluer malheureusement en arrivant, il a fermé la porte de la maison et s’est servi d’un fer pour m’intimider d’ouvrir mes jambes. J’étais vraiment obligée de le faire, en sortant de là j’ai cherché quelqu’un pour m’aider à le traduire en justice, malheureusement; tout le monde me disait qu’il me fallait le moyen consistant pour y parvenir”, regrette-t-elle.
Vers une loi d’exemption des frais de justice aux victimes, une initiative saluée.
Les femmes du Sud Kivu à travers le Caucus des femmes pensent que, le député national Juvénal Munubo et l’organisation Journalistes pour les Droits Humains sont à féliciter pour les démarches qu’ils ont effectués jusqu’à parvenir aux résultats actuels. Le stade actuel où se situe le processus de ladite proposition de loi est à féliciter.
“Les femmes dans leurs luttes ont toujours voulu que les victimes des violences sexuelles en RDC soient remises dans leur droit mais par manque d’un accompagnement, on y est jamais parvenu”, explique Solange Lwashiga secrétaire exécutive du caucus des Femmes Congolaises pour la paix au Sud Kivu.
A elle d’ajouter; “Voici une bonne occasion où notre lutte doit être accélérée pour avoir gain de cause. C’est déjà une avancée significative dans le cadre de la promotion de droit de la femme et de la lutte contre l’impunité. Nous le savons, la justice congolaise est budgétivore c’est à dire que quand quelqu’un n’a pas de moyen, il ne peut pas aller en justice et celà handicap les victimes. En tout cas, l’adoption de cette loi par les Députés est un pas de géant même si certaines difficultés sont encore à noter et il faut que tout celà soit encore suivi de près”, déclare-t-elle.
Cependant, Solange Lwashiga appelle les victimes des violences sexuelles d’être prête à saisir l’opportunité dès que la loi sera promulguée pour dénoncer les bourreaux afin de donner une valeur à cette nouvelle loi en leur faveur.
“Aux femmes victimes de ces actes de violences sexuelles, ce qui vous arrive ne pas de votre faute, vous n’êtes pas seules, il y a même des hommes qui en sont victimes aussi. Je vous demande chères survivantes de briser le silence, de ne pas avoir peur de dénoncer les bourreaux car lorsqu’on garde silence, on contribue à ce qui arrive de mal à nos sœurs, nos mamans, nos frères et nos parents. Prenez soin de vous adresser aux organisations des droits des femmes qui sont capables de vous accompagner. Elles sont nombreuses au Sud Kivu et elles sont prêtes à vous accompagner et vous protéger quand il s’agit de dénoncer les bourreaux”, poursuit-elle.
Pour le député Polycarpe Bushenyula Élu du territoire de Walungu, la lutte contre les violences sexuelles est une lutte qui a déjà un bon départ et a une bonne allure. Comme tout activiste de droit de l’homme, il se range derrière toutes les organisations qui militent contre l’impunité afin de pousser le Sénat à ne pas réduire à zéro le travail des députés nationaux.
«Cette loi est arrivée et tombe au bon moment puisque, depuis longtemps on se le disait, comment est-ce que les victimes n’obtiennent jamais réparation? C’est peut-être parce-qu’ils n’ont pas de frais pour aller en justice et pourtant les bourreaux circulent librement. Si les frais sont exemptés, ils peuvent arriver à se plaindre devant les instances judiciaires et trouver solution”, réfléchit-il.
“Nous savons qu’ il y a beaucoup de procès qui n’aboutissent pas parce-qu’il y a pas des frais. Voilà pourquoi, nous avons soutenu cette loi puisque dorénavant, les victimes pourraient commencer à dénoncer les auteurs. Si j’étais un Sénateur, la tendance serait même de donner plus de confiance aux députés qui ont jugé recevable cette proposition de loi. Déjà en première lecture j’étais d’accord, c’est à dire que j’allais justement l’adopter sans anicroche au niveau du Sénat”, poursuit-il.
A lui de donner une orientation; “J’allais seulement ajouter ce qu’on a pas vu dans le texte. Qu’il n’y ait pas d’amnistie pour les auteurs de ces violences car nos sœurs, nos mamans souffrent à cause d’eux”.
Un plus pour les acteurs contre les violences sexuelles.
A en croire madame Furah Byabuze, Commissaire Générale en charge du Genre, Famille, Affaires sociales et Relations avec les partenaires au Sud-Kivu, cette loi est salutaire pour son commissariat car désormais, ils pourront poursuivre avec les différents processus pour aider les victimes des violences sexuelles d’obtenir réparation en justice.
«C’est réellement un ouf de soulagement pour nous et pour les victimes des violences. À notre niveau, nous ne pouvons que féliciter les députés nationaux et leur demander de ne pas se limiter par là. Qu’ils continuent à réfléchir sur d’autres lois qui pourront protéger les vulnérables en RD Congo puisqu’ils sont abandonnés à leur triste sort. Dès lors, notre commissariat pourra savoir comment accompagner les victimes des violences sexuelles en justice pour lutter contre l’impunité des cas des violences sexuelles”, laisse-t-elle entendre.
Pour rappel, cette proposition de loi qui modifie et complète le décret du 6 août 1959 portant code de procédure pénale congolais a été adoptée à l’assemblée nationale et elle est en ce moment en secondaire lecture au niveau du Sénat.
Pacifique Mulemangabo, JDH
