Sud-Kivu/Kavumu: Condamnation des bourreaux des viols sans exécution des dommages et intérêts, le recours aux arrangements à l’amiable refait surface

La non exécution effective des jugements en matière des violences sexuelles à Kavumu au Sud-Kivu encourage le recours aux arrangements à l’amiable. Cette situation s’observe pendant que le centre commercial de Kavumu continue à enregistrer des cas des VSBG. Selon les informations reçues à la Clinique juridique de la Fondation Panzi de la zone, la moyenne de cas observés souvent sélève à 45 par mois.

Malgré qu’il existe dans ce centre commercial, depuis août 1993, un tribunal de grande instance pour pallier aux problèmes d’ordre judiciaire dont parmi eux, ceux des violences sexuelles et basées sur le genre, VSBG, des survivantes préfèrent recourir aux arrangements à l’amiable que de dénoncer leurs bourreaux devant la justice.

Problème d’indemnisation judiciaire

Kavumu étant le plus grand centre commercial du territoire de Kabare et érigé près de l’aéroport qui porte le même nom, connaît plusieurs cas de violations des droits de l’homme depuis les années 2000 lors des guerres des libérations.

Des parents de certaines survivantes abordées à ce sujet expliquent qu’ils recourent aux arrangements à l’amiable au lieu de la justice à défaut de lexécution des jugements en ce qui concerne les dommages et intérêts que doivent recevoir des survivantes.

Pour eux, la non matérialisation des jugements dans l’ensemble, décourage les efforts que fournissent les habitants qui recourent à la justice. Pour ceux interrogés, ils déplorent de voire que des jugements sont rendus mais les victimes ne bénéficient d’aucun dédommagement comme réparation. Situation qui fait que selon nos sources, les survivantes restent abandonnées à leurs tristes sorts et exposées aux représailles des familles des bourreaux dans la plupart des cas.

C’est le cas d’un parent d’une survivante qui s’est exprimé sous anonymat qu’on a rencontré dans le village de Buhandahanda. Sa fille a été violée en novembre 2021 et le bourreau a été condamné à une peine de prison au mois de février 2022.

“Depuis la condemnation du bureau de ma fille explique notre source, ma famille et celle de l’auteur du viol nous sommes rester opposée. Malheureusement, 3 mois après la condamnation, le bourreau de ma fille est mort dans la prison centrale de Bukavu”, révèle-t-il.

Restée sans aucune assistance ni recevoir le dédommagement après condamnation, la famille de la survivante s’est vue exposée aux représailles.

“Le même jour de l’annonce de la mort du bourreau de ma fille en prison, ma famille a été accusée d’être à la base de ce décès et notre habitation a été brûlée. On a été chassées même du village”, explique notre source avec angoisse.

“Je regrette, poursuit-t-il; d’avoir dénoncé devant la justice le viol de ma fille car, malgré la dénonciation je n’avais rien reçu et ce qui m’arrive est consécutive à ma dénonciation”, explique-t-il.

Et d’ajouter:

“Ma fille aussi qui était victime du viol est restée sans aucune assistante ni dedomagement et elle est aujourd’hui mal réputée avec des moqueries contre elle”, regrette notre source.

Dautres survivantes soutiennent que les arrangements à lamiable vu quavec cette méthode, la famille du bourreau arrive à payer un montant après arrangement.

“Javais eu le premier cas en famille et javais dénoncé mais rien reçu comme dédommagement après condamnation du bourreau. Malheureusement un deuxième cas est intervenu encore dans ma famille et pour cette fois, un voisin mavait conseillé de ne plus dénoncer et de dialoguer avec la famille du bourreau. On l’avait fait et après discussions, nous étions convenus du versement d’une somme de 800$ et javais dabord reçu 400$”, renseigne Nyakahama Antoine, parent dune survivante.

Une violation des droits des survivantes

Me Félix Kambaza affirme que la loi sur les violences sexuelles du 20 juillet 2006 à son article 1er interdit les arrangements à l’amiable ou des amendes transactionnelles en matière des violences sexuelles en ces termes, “L’amende transactionnelle prévue à l’article 9 du code de procédure pénale ne s’applique pas aux infractions des violences sexuelles ». Ce qui est interdit par la loi, le faire est une violation de la loi qui protège les survivantes et du coup c’est une violation des droits des victimes.

“Le recours aux arrangements à l’amiable ne constitue en rien une garantie de dédommagement des victimes des violences sexuelles. Malgré que certaines personnes optent pour ça, il y a des cas qui sont dénoncés après le non respect des accords où les deux familles se fixent une amende. C’est ce qui montre qu’il y a aucun soubassement juridique qui donne une garantie aux conclusions des arrangements à l’amiable. Même dans les conditions où la famille du bourreau arrive à payer pour épargner le bourreau d’être déféré devant les instances juridiques mais la survivante reste traumatisée dans le reste de sa vie”, explique Me Felix.

Nsimire Kagura Aimerance, coordinatrice de lassociation vision globale pour le développement intégral en RDC VGDI, reconnaît le recours par des familles des survivantes des viols à Kavumu aux arrangements à l’amiable.

Pour Nsimire, outre le manque de dédommagement elle évoque aussi la pauvreté et l’ignorance de la loi pour certaines personnes qui le font.

Tout en confirmant lexistence des arrangements à lamiable au détriment de la justice à Kavumu, Nsimire Aimerance révèle que, “Certaines familles des survivantes préfèrent des arrangements à l’amiable qu’elles considèrent comme un moyen facile de dédommagement. Cela, vu que la famille du bourreau négocie avec celle de la victime pour empêcher la dénonciation de l’acte à la justice. Cette pratique n’est pas autorisée par la loi sur les violences sexuelles en RDC”, rappelle-t-elle.

“Souvent après que la famille de la survivante arrangé à l’amiable avec celle du bourreau, les deux parties se conviennent de ne jamais faire parvenir le dossier à la justice car résolu à l’amiable. Nous on dénonce, mais dommage car on ne reçoit pas daccompagnement des familles des survivantes pour bannir les arrangements à l’amiable et cela rend difficile lévolution du processus”, regrette-t-elle.

“Cependant, on continue toujours à faire des sensibilisations au sein de la communauté pour qu’on cesse de recourir aux arrangements à l’amiable et saisir la justice”, révèle-t-elle.

La fondation Panzi accompagne les survivantes

Me Félix ajoute que, “La phase de dédommagement est une action civile et la partie civile bénéficiaire du jugement doit ouvrir un autre dossier au tribunal qui avait exécuté le jugement pour que le bourreau puisse payer le dommage et intérêt à la survivante. Le principe est posé aux articles 258 et 259 du code civil livre III”. Larticle 258 dispose que, “Tout fait quelconque de lhomme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.” Et larticle 259 renchérit: “Chacun est responsable du dommage quil a causé, non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence”.

“C’est regrettable de voir que cette procédure est moins suivie par plusieurs survivantes et cela par ignorance. Si la survivante na rien reçue comme réparation, vu que plusieurs d’entre elles nobtiennent pas réparation de la part de la justice congolaise, la fondation panzi par son projet de réparation arrive à prendre en charge certaines survivantes surtout quelle accompagne en leur octroyant un montant sous forme de réparation mais aussi; un accompagnement psychologique et sanitaire. Malheureusement c’est un appui qui ne remplace pas celui de lÉtat congolais”, conclut-il.

“La clinique juridique accompagne les survivantes depuis la police jusqu’à la phase du jugement. Après le jugement, le parquet fait le suivi si le condamné a purgé sa peine”, affirme-t-il.

Contacté à ce sujet, le chef du groupement de Bugorhe, Joyeux Kalibanya, reconnaît la situation et affirme s’impliquer pour mettre des mécanismes en marche pour que les survivantes qui approchent la justice obtiennent réparation. Il compte pour y arriver, collaborer avec les instances judiciaires de la place pour activer un mécanisme des suivis des dossiers des dédommagements des survivantes conformément aux jugements rendus.

Pour lui, ne pas mettre un mécanisme pour faciliter l’octroi des dommages et intérêts aux survivantes des violences sexuelles, risque de ralentir les efforts déjà entrepris par les organisations des défenses des droits de lhomme qui sensibilisent les survivantes à dénoncer les cas à la justice.

Me Félix recommande cependant à lÉtat congolais, de prendre ses responsabilités ou créer une procédure spéciale de recouvrement des dommages et intérêts pour les survivantes des VSBG. Il soutient par ailleurs, la création d’un fond durgence d’assistance financière aux survivantes des violences sexuelles VSBG.

Munguashuza kalimbiro barack, JDH.

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