Sud-Kivu : De plus en plus des femmes participent à la gestion du pouvoir coutumier

La lutte à travers les mouvements féministes pour la cause de la femme touche aussi le pouvoir coutumier dans la province du Sud-Kivu. Le rang de Mwami (roi) étant exclusivement réservé aux hommes, certaines femmes se voient de plus en plus admises à certaines fonctions importantes, initialement verrouillées. Même si beaucoup reste encore à faire.

C’est le cas de la chefferie de Kaziba. Ici, c’est la Mwamikazi « reine » Félicité Kabonwa Naweza qui a assumé l’intérim du trône couturier dans la Chefferie de Kaziba à deux reprises. Pourtant, dans plusieurs communautés de la place, le rôle de la femme comme pièce centrale de gestion coutumière est minimisé.

“J’ai commencé à gérer la chefferie de Kaziba pour la première fois de 1967 jusqu’en 1987. J’avais 20 ans et je venais de terminer mes études secondaires. Mon jeune frère était encore petit pour gérer et on avait décidé de me confier la gestion.

La deuxième fois c’est après le décès de mon jeune-frère qui est devenu roi par la suite. Comme son fils qui est mon neveu devrait hériter le pouvoir mais était encore aux études à l’étranger et n’était pas encore mature, la gestion de la chefferie m’a été encore confiée de 2011 jusqu’en 2020», souligne, Félicité Naweza, l’une des rares femmes à avoir occupé ce rang au Sud-Kivu.

En effet, dans cette province, la tradition est patriarcale. La femme n’ayant donc pas droit de régner sur des hommes ou de succéder au trône sur le plan coutumier.
Félicité est donc l’une des rares femmes qui ont eu à exercer cette fonction. Ces 30 dernières années, sur une cinquantaine de chefferies que compte la province, au moins trois femmes seulement y sont parvenues. Quoique de manière temporaire, en attendant la maturité du successeur homme.
“Je sais bien que dans certaines entités c’est difficile pour une femme de gérer la chefferie. Dans ma coutume, ça n’a pas été le cas. Dans d’autres coutumes patriarcales comme la nôtre, il y a ceux qui n’acceptent pas que les femmes accèdent au trône. Moi j’avais eu une grâce”, reconnaît-elle.

Encore plus d’efforts pour la femme
La place de la femme dans les coutumes locales, au Sud-Kivu, connaît d’énormes progrès depuis quelques années.

Suite aux sensibilisations et activisme des mouvements féministes, certains chefs coutumiers commencent à comprendre l’importance de la représentativité de la femme aux postes décisionnels. Mais aussi l’importance de décourager certaines pratiques discriminatoires. C’est le cas de la chefferie de Buhavu dans le territoire de Kalehe.

« En tant que société patriarcale, beaucoup plus le pouvoir était laissé aux hommes qu’aux femmes.

Actuellement, de plus en plus on est entrain de reconnaitre la place et le rôle de la femme dans le pouvoir coutumier. Il faut voir, même lors de célébrations coutumières on remarque que les femmes commencent à être associées », révèle Douce Namwezi, Directrice de l’organisation Uwezo Africa, une ONG de promotion des droits de la femme.

«Il n’y a pas trois ans depuis que le chef coutumier à commencé à nommer les femmes comme cheffes des groupements.
C’est-à-dire que pour la question de la femme au sein des espaces coutumiers, nous au niveau de Buhavu nous en connaissons déjà quelque chose et il faut maintenant qu’on continue à mener le plaidoyer pour que les femmes accèdent à d’autres postes au niveau de la chefferie », précise le député provincial Koko Chirimwami Akeem, ancien chef de groupement de Mbinga nord dans la chefferie de Buhavu.

Le changement s’observe aussi dans la chefferie des Barundi, dans la plaine de la Ruzizi. Les changements sont de plus en plus visibles.

« Je sais bien qu’il y a de ces coutumes où la femme ne peux jamais parler devant les hommes mais chez nous, la femme n’est pas chosifiée comme on l’attend ailleurs, il y a de ces décisions qu’on ne peut jamais prendre sans l’aval de la femme », révèle le Mwami Ndabagoyi Richard, chef de la chefferie des barundi.

« Au niveau du palais royal il y a toujours la reine mère qui influence les décisions du roi, il y a également les conseillers de la femme du mwami qui influence la reine sur la question des plaidoyers », explique-t-il.

Des défis encore à relever Malgré les avancées sur le rôle de la femme dans certaines sociétés traditionnelles au Sud-Kivu, celles-ci reste confrontée à plusieurs défis. Notamment celui d’accéder à certaines fonctions coutumières et ce suite à la discrimination et aux mythes.

«Il y a des choses coutumières, des valeurs qui ne sont gardées que par les homes par exemple la femme ne peut jamais entrer dans le kagombe « Maison où le roi se reunit avec les gardiens de la coutume » du mwami lors de ces cycles menstruel car elle constitue une puissance et dans ce palais là il y a d’autre puissance or deux puissances ne peuvent pas habiter dans une même maison. Si une fois les femmes y entrent pendant cette période, ça peut produire des effets négatifs”, reconnaît le député Koko Cirimwami.

“C’est pour cela qu’on doit en discuter avec les Bami avant que je ne propose un édit pour que les femmes arrivent aussi à siéger comme gardienne de coutume qui est un travail réservé qu’aux hommes actuellement.

Cet édit doit être accepté par tous. C’est pourquoi, je ne peux pas proposer un édit sans que je n’ai les éléments convaincants de la part des chefs coutumiers », ajoute-t-il.

Des organisations qui luttent pour les droits de la femme continuent de sensibiliser les membres de la communauté et les autorités coutumières sur la question d’accès par les femmes aux postes décisionnels.

“Pour améliorer la condition de la femme dans la gestion de la chose publique il faut que la femme mette dans sa peau que son rôle n’est pas pour les ménages, faire les champs et garder les enfants. Que la femme comprenne qu’elle doit faire les études et prouver ses capacités”, recommande

Le mwami Ndabagoye Richard ajoute que la question de la femme pour accéder au poste décisionnel dépend d’une coutume à une autre.

« Ce qui fait que les femmes n’accéder pas aux postes décisionnel dans les palais royal, cela dépend aussi des normes de chaque coutumes car chez moi il y a des décisions que je ne peux jamais sortir sans l’aval de la reine mère mais sans oublier que l’héritage par du père au fils et non du père au fille ».

Me Espoir Mushamuka affirme qu’à l’article 11 de la constitution, il est dit que tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droit.

« Toute fois, la jouissance de droit politique est reconnue au seul congolais sauf exception établie par la loi.

C’est-à-dire que les femmes aussi ont droits de prendre des décisions par rapport à tout ce qui se fait au sommet de l’Etat et aujourd’hui on parle des droits humains ce que la femme à les droits de bénéficier toute les opportunités aussi », conclut-il.

“ J’encourage la femme à competir toujours avec les hommes et à tous les niveaux. Qu’elle ne baisse pas les bras. Aujourd’hui je ne suis plus au trône mais je suis député provinciale donc je participe toujours dans la gestion”, Félicité Naweza.

Cet article a été produit en collaboration avec Journalistes pour les droits humains, JDH/JHR avec l’appui d’Affaires mondiales Canada.

Natasha Balegamire

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