Élections de 2023: une charte d’engagement des partis et regroupements politiques comme une garantie du respect de l’alignement massif des femmes et filles sur les listes électorales au Sud-Kivu

La nouvelle loi électorale de la RDC à son article 13 consacre l’exemption de la caution aux listes qui respectent l’équilibre du genre aux prochaines élections. Pour ce faire, une charte d’engagement des partis et regroupements politiques est indispensable pour la promotion du genre, ceci conformément à l’article 33 du code civil livre III, stipulant que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Après son vote au parlement, la loi a été promulguée par le chef de l’Etat le 29 juin dernier. Cependant, l’article 13 encourage l’alignement massif des femmes et filles par la suppression du paiement de la caution pour des listes qui respectent la parité. Cette disposition qui du moins reste sans mesure contraignante, ne cesse de susciter de réactions dans l’opinion Sud-Kivutienne. Pour certains observateurs une charte d’engagement des partis et regroupements politiques à aligner un grand nombre des femmes et filles en 2023 est un atout.

L’Union pour la démocratie et le progrès social, UDPS-Tshisekedi ville de Bukavu est l’une des formations politiques qui sont d’accord avec cette idée. Pour ce parti politique, l’acte d’engagement est un autre outil d’appui à la matérialisation du respect de genre selon la constitution. Son chargé de communication dans la ville de Bukavu, Jean Baptiste Kasole, rassure que sa formation politique s’est déjà engagée sur cette voie et que toutes les femmes ambitieuses qui croient à leur idéologie figureront bel est bien sur leurs listes électorales.

« A notre niveau nous estimons qu’une charte d’engagement de tous les partis politiques peut garantir la parité en ce qui concerne l’élaboration des listes électorales. Car c’est un instrument d’appui qui rassure la volonté des partis politiques à matérialiser l’esprit de l’article 13 de la loi électorale sur l’alignement massif des femmes et filles sur des listes électorales. Étant un parti au pouvoir, nous nous sommes déjà engagés sur cette voie que prône le chef de l’État. Nos listes électorales devront compter un nombre significatif de femmes, qui ont l’ambition. C’est pour quoi avec ou sans charte d’engagement au niveau de l’UDPS, les femmes combattantes seront alignées et à un nombre élevé » nous dit Jean Baptiste Kasole.

Par contre, d’autres estiment qu’au-delà de ça, une charte d’engagement des partis et regroupements politiques au respect strict de l’acte paritaire aux prochaines élections n’est pas une garantie.

C’est le cas de Nicolas Kyalangalilwa responsable en province du parti Leadership gouvernance pour le développement, LGD qui estime que cet engagement est une avancée et non une garantie.

« Je crois qu’un acte d’engagement des partis et regroupements politiques ne sera pas une garantie, mais sera quand même une avancée en ce qui concerne l’alignement des femmes et filles sur les listes électorales. Cependant, il faut le dire que cet alignement devrait être précédé par une identification suivie d’une formation de ces femmes et filles, parce que la compétition est rude et souvent on ne retrouve pas des femmes suffisamment outillées et préparées, » précise-t-il.

Des femmes à des ambitions politiques s’expriment.

Agnès SADIKI, femme politique du Sud-Kivu est d’avis que seul l’engagement des responsables des partis politiques peut rassurer la présence massive des femmes et filles sur des listes électorales. Pour elle, les analyses et observations montrent que les femmes ne sont que des spectatrices au sein des partis politiques, voilà pourquoi les responsables des partis et regroupements politiques ont le devoir d’aligner les femmes au prochain scrutin afin d’espérer à un changement.

« Mais bien-sûr! parce que si les hommes ont pu réussir à aligner les hommes c’est parce qu’il y a eu l’engagement et des hommes et des femmes, (…) et pour en arriver là, il faut en tout cas l’engagement des responsables des partis politiques car c’est la principale voie pour aligner les femmes et filles sur les prochaines listes électorales», Martèle-t-elle.

Une occasion pour elle d’appeler ses collègues femmes à s’engager aussi en masse sur la voie politique enfin de faire le combat ensemble sur le respect de la parité comme voulu par la constitution et encourager par la loi électorale.

Pour sa part, Venantie Bisimwa femme politique et plusieurs fois candidates à la députation au Sud-Kivu, pense que l’engagement doit être individuel pour chaque formation politique. Cela se justifie par le fait que la loi elle-même n’a pas un caractère coercitif, ce qui selon elle ouvre la voie à certains dirigeants des partis et regroupements politiques à aligner qui ils veulent.

«Une charte d’engagement oui, mais c’est individuel dans chaque parti politique. Avec les autorités morales la charte peut être signée mais quand les femmes membres n’ont pas une base pour gagner un siège c’est aussi un problème. Autant que cette détermination est manifeste dans la loi, nous souhaiterions que les leaders des partis politiques s’y engagent dès maintenant pour que les femmes soient nombreuses sur les listes, mais aussi qu’un grand nombre soit élu en 2023», nous a confié Venantie.

Pour la Société civile l’idée d’une charte d’engagement n’est pas mauvaise, mais la question principale demeure l’obligation légale des partis politiques dès lors que la constitution consacre la parité. Oswald Rubasha expert électoral et membre de la société civile qui s’est confié à nous insiste sur la responsabilité des différents chefs de partis et regroupements politiques qui selon lui ont l’obligation d’aligner un grand nombre des femmes aux prochaines élections enfin de prouver qu’ils sont démocrates et légalistes.

« Oui l’idée n’est pas mauvaise, mais la question principale c’est plutôt l’obligation légale des partis politiques. Une charte d’engagement c’est un document de plus (…), nous pensons que les partis politiques ont l’obligation aujourd’hui ou jamais de nous prouver qu’ils ont des démocrates, des légalistes et qu’ils ont le souci de construire notre pays», souligne-t-il.

Et de poursuivre:

« on ne peut pas espérer construire un pays lorsque 52% de la population est mise à l’écart. Un appel à responsabilité des acteurs des partis politiques, ce qu’on appelle autorités morales de comprendre qu’elles doivent assumer cette responsabilité, de comprendre que leurs partis politiques doivent s’ouvrir en faveur de la femme, avoir des listes paritaires».

Le chargé de suivis et évaluation chez l’organisation Réseau des femmes pour la défense des droits et paix (RFDP) salut cette approche d’une charte d’engagement des partis et regroupements politiques avec les mouvements des femmes pour barrer la route à l’élaboration des listes composées des membres des chefs de ces derniers. Félix Birimwiragi confirme que sa structure accentue des sensibilisation enfin que les partis politiques respectent la parité.

« Notre organisation se bat pour le respect du genre partout. Nous ne pouvons jamais nous opposer à une démarche qui cherche à amener la femme en avant. Cette charte est capitale pour rassurer la volonté des chefs des partis et leur engagement. Nous connaissons comment ils élaborent les listes, soit un membre de famille soit un proche, et cela exclut les femmes. Nous estimons qu’avec l’engagement contenu dans une charte d’engagement, un nombre significatif des femmes peut être aligné », souligne-t-il.

Celui-ci propose également à la CENI d’être rigoureuse lors de la réception des listes des candidats dans le but de décourager le non respect de celle-ci.

Juridiquement, nous fait savoir Maître Joseph Bashwira, une charte d’engagement peut prendre la forme d’une convention ou (acte d’engagement) selon l’article 33 du code civil livre III.

« Évidemment une charte d’engagement peut être une garantie, ça sera sur base de l’article 33 du code civil livre III, qui dit que les conventions légalement formées tiennent lieu de droit de ceux qui les ont faites. Ça ne pourra qu’engager les partis politiques eux-mêmes, la société civile et les mouvements des femmes qui les auront signé, pour dire que désormais aux prochaines élections on alignera des candidatures de manière paritaire», rapporte Me Joseph.

Tout en étant d’accord de l’idée d’une charte d’engagement de la part des partis et regroupements politiques, le Secrétaire exécutif provincial de la Commission électorale nationale indépendante, CENI Gaudens Maheshe rassure que d’autres mesures d’applications sur le respect de la loi électorale existent déjà, mais non encore approuvées par la cour constitutionnelle.

« Oui, les experts de la CENI ont travaillé pendant deux semaines sur les mesures d’application de la loi électorale. Le texte est soumis à la cour constitutionnelle pour qu’elle puisse se prononcer sur la constitutionnalité des mesures d’applications, si elle trouve des failles, elle pourra demander à la CENI de corriger», a rassuré Gaudens.

Cependant, il appelle les femmes et filles à adhérer dans des partis politiques, car selon lui, c’est le seul moyen qui fera qu’elles soient massivement alignées aux listes électorales.

Juvénal Mutakato, JDH

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