Les opérateurs économiques et certaines entreprises de la ville de Bukavu ont du mal à reprendre leurs activités, un mois après les récents pillages ciblés enregistrés à différents endroits. Cette situation présente des conséquences énormes sur le tissu économique de la ville de Bukavu et du Sud-Kivu en général, estime Kandanda Maroy, enseignant d’université, joint par notre rédaction ce vendredi 14 mars.
Pour cet enseignant d’économie, après les récents pillages, toutes les activités économiques sont instables sur le marché. Les actes de vandalisme qui ont touché la plupart des opérateurs économiques et grandes entreprises ont conduit à la perte de leurs marchandises et presque leur investissement.
« Ces pillages ont occasionné la destruction des stocks mais aussi de capital. Les acteurs économiques ont perdu beaucoup en terme des marchandises mais aussi en terme d’investissements, et le fait que, ils en ont perdu, ça va prendre beaucoup de temps pour qu’ils se relèvent et rebâtir de nouveau leur capital. Certains vont devoir fermer leur commerce et certains d’autres ont également peur de réinvestir dans le même secteur, » explique l’Assistant Kandanda Maroy.
Ces pillages ont également d’énormes conséquences sur les ménages, par le fait que, de nombreux responsables ont perdu leur emploi.
« (…), ce qui fait que l’activité économique dans son ensemble tourne au ralenti, occasionnant une perte d’emplois, mais aussi la hausse de prix pour certains biens de première nécessité, tout simplement par ce que l’offre a sensiblement diminuée face à une demande croissante. Également ces pillages ont occasionné la chute du pouvoir d’achat mais aussi la précarisation des ménages ; la plupart de menages vivent du commerce, le fait qu’ils ont perdu tout, cela fait qu’ils ne peuvent plus honorer à leurs engagements, que ce soit le loyer, que ce soit au niveau de l’alimentation du ménage,» poursuit cet enseignant.
Et de renchérir, « beaucoup de conséquences se ressentent actuellement dans les ménages, notamment la sécurité alimentaire, ect…En tout cas le pillage a occasionné la régression,».
Cris d’alarme des habitants
Les vendeurs et vendeuses disent aussi subir actuellement un coup dur de ces récents pillages, et dont nombreux ont du mal à se remettre. Certains interrogés, témoignent de la situation actuelle au marché.
« La vie devient de plus en plus difficile suite notamment à la carence des certaines marchandises sur le marché ; et ceux qui en ont, n’ont pas de clients. Toute la journée on est là, certains qui passent disent qu’il n’y a pas d’argent. Vraiment la situation est grave, ce qui fait que nous, les commerçants à part la marchandise que nombreux ont perdu, personne n’arrive plus se procurer d’autres marchandises,» témoigne une commerçante.
Instabilité du taux de change
Cette femme commerçante justifie également cette situation par l’instabilité du taux de change du dollar américain.
« Le dollar est aussi à la base de cette situation. Le taux a grimpé jusqu’à 3200 Francs congolais pour 1 un dollar, pourtant c’était à 2800 francs congolais avant. Même si nous nous procurons des marchandises à ce prix, qui est ce client qui va accepter de payer un produit à ce taux ? En tout cas tout le monde pleure, les grands commerçants tout comme les petits et les revendeurs, tous on est victimes de cette situation,» s’alarme cette commerçante.
Illustration des individus en plein pillage à Bwindi
Même son de cloche pour ce vendeur qui vivait au taux du jour comme il le fait savoir.
« Nous, on vivait au taux du jour. Là où nous allions prendre la marchandise pour vendre et payer après on a tout pillé. Nous ne savons plus comment subvenir à nos obligations en tant que parent. Nous essayons de nous débrouiller ici présentement au marché, mais un autre problème, c’est celui du taux de change qui s’échange selon les humeurs de chacun,» indique-t-il.
Impact sur les emprunts bancaires
Ces vendeurs et vendeuses émettent leurs inquiétudes pour ceux qui avaient de crédits auprès des banques et coopératives et dont leurs marchandises ont été volées.
« Nombreux parmi nous évolué avec le capital emprunté soit dans une banque, soit dans une coopérative. Après avoir tout perdu dans ces pillages, en tout cas la suite on ne sait pas. Si du moins ces institutions étaient opérationnelles, on saurait peut être comment faire. Il peut s’agir d’emprunter à nouveau pour permettre au redémarrage. Nous avons tellement peur, nombreux risquent d’être le premier à être emprisonnés, » s’inquiète un autre vendeur.
Face à la gravité de la situation, ces vendeurs plaident pour l’amélioration des conditions sécuritaires dans la ville de Bukavu et dans toute la région en général afin que toutes les activités reprennent normalement.
Pour rappel, la ville de Bukavu a connu des pillages systématiquement honteux entre le 15 et le 16 février dernier, à la veille de l’entrée en ville du mouvement politico-militaire AFC-M23. Entrepôts, dépôts, dont ceux de la société brassicole Bralima et du Programme alimentaire mondiale (PAM) ainsi que des boutiques et échoppes au marché central de Kadutu et ailleurs, ont été systématiquement saccagés.
Les conséquences de ces actes inciviques affectent actuellement le tissu économique de la ville et des ménages un mois après; d’où des appels à une urgence pour régler la situation.