RDC/Elections : La désignation de Denis Kadima à la tête de la CENI présage un avenir orageux pour le prochain scrutin et la démocratie congolaise, Arnold Nyaluma (Interview)

Des réactions fusent de toutes les parts à la suite de la désignation de Denis Kadima Kazadi à la tête de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) par l’Assemblée nationale pour organiser les élections de 2023 en République démocratique du Congo.
Cet entérinement fait objet des protestations et d’incompréhensions sur la scène politique congolaise provoquant des réactions d’experts en matière électorale, des analystes politiques et des penseurs libres.
Dans un entretien avec la rédaction de Jambordc.info, ce lundi 18 Octobre 202, Arnold Nyaluma, Professeur en droit de l’Université Catholique de Bukavu (UCB) et défenseur des droits humains, estime que cette désignation présage un avenir orageux pour les prochaines élections ainsi que la démocratie en RDC.
Voici l’intégralité de l’entretien ;

Prof Arnold, Denis Kadima a été entériné à la tête de la CENI. Quel avenir pour le prochain scrutin déjà que sa désignation peine pour l’instant à faire l’unanimité?
<< Je crois que ce n’est pas un bon signe pour l’avenir de la démocratie au Congo parce que quand vous voyez dans un match, il y a un joueur qui fait l’avocat de l’arbitre c’est qu’il sait déjà ce qui va se passer. Et c’est très malheureux de voir qu’en Afrique et au Congo on répète quasiment les mêmes erreurs. Et, il y a peu nous nous sommes mobilisés pour dire non à Ronsard Malonda qui avait été désigné presque dans la même forme. Aujourd’hui, l’Union sacrée reproduit le même modèle. Après on peut s’accrocher sur les chiffres, est-ce qu’il y a deux confession religieuse? Plutôt huit. Est-ce que les anciens qui étaient désignés par les deux confessions ont été excellents? Mais là n’est pas la question. Lorsqu’on sent que l’animateur principal penche pour tel camp, sachez que nous partons vers un processus électoral contesté>>.
Vous parlez d’un processus électoral contesté. Mais il y a quand-même une possibilité que l’actuel chef de l’Etat se fasse élire pour un deuxième mandat, non?
<< Et ça signifie également que les 5 années à venir si l’actuel chef de l’Etat est élu on va vivre la même situation comme les cinq dernières années du régime de Joseph Kabila. C’est-à-dire une autorité complètement isolée alors à ce stade on peut espérer mais je doute, qu’il y ait encore un sursaut de conscience où le chef de l’Etat fait comme il a fait précédemment en refusant d’entériner cette désignation en renvoyant les confessions religieuses à s’entendre. Et que ce soit s’entendre sans Kadima>>.
Pourquoi renvoyer les confessions religieuses à un conciliabule mais sans monsieur Kadima?
<< Parce que c’est lui le problème. Mais je ne le vois pas le faire, parce qu’on a l’impression que l’Union sacrée veut forcer la main et veut contrôler toutes les institutions comme ça a été le cas sous le régime passé. En fin de compte c’est parce que l’Union sacrée n’est rien d’autre que le FCC amputer de son chef. Qui du reste ne s’est jamais proclamé officiellement. Et c’est la théorie du corbillard, c’est-à-dire les mêmes acteurs, ils déplacent une autorité et puis ils reviennent aux affaires. Et donc, ils vont faire la même chose. C’est-à-dire qu’ils vont salir jusqu’au bout le Chef de l’Etat entre temps ils tirent différents avantages>>.
Maintenant, que faire ou quelles peuvent être les voies de sortie?
<< En tout cas on ne peut pas compter sur la cour constitutionnelle qui est déjà dans les poches du pouvoir. Il reste le chef de l’Etat lui-même et nous verrons jusqu’où il va prendre la hauteur. Le message que je peux donner c’est plutôt à la société civile c’est-à-dire aux forces vives dans leur ensemble. On a prétendu qu’il y a deux religions contre six. Le premier élément c’est celui des infrastructures, nous allons voir sur l’ensemble du pays si ces six confessions religieuses ont combien d’écoles, combien d’espaces où les élections peuvent se tenir; combien des cadres de directeurs d’écoles qui peuvent organiser ces élections-là. Elles n’en ont pas. Or si en ce moment précis l’ECC et la CENCO maintiennent leur position et décrètent la non coopération. C’est-à-dire que ces deux confessions refusent de travailler avec cette CENI ainsi implanter. Eh bien, ça va se bloquer. Après on va dire à qui profite le crime? Il y en a qui vont dire c’est parce que vous avez contesté la CENI, on ne va pas organisé les élections>>
Et vous pensez que qu’est-ce qui pourrait être à la base de l’incompréhension des confessions religieuses?
<< Les confessions religieuses ne s’entendent pas parce qu’il y a quelques individus qui ont bloqué la machine. Et c’est la reconduction des pratiques de l’ancien régime. Loin de l’idée d’accélérer le processus électoral, cette désignation va cependant accélérer la fraude ou la contestation électorale. Ce qui signifie qu’en 2023, le régime actuel ne compte pas sur ses réalisations ni sur le peuple congolais. Mais il compte sur les institutions. Et l’expérience qu’on a eu, dès que vous avez dépassé votre champs de légitimité, c’est-à-dire la période pour laquelle vous avez été élu, vous perdez automatiquement toute confiance en tout cas toute crédibilité. Donc l’invitation que je peux faire, c’est aux forces politiques de ne pas coopérer avec une cellule déjà infiltrée>>.
Pour finir, quel est le message que vous adressez peut-être à l’opposition?
Je pense même que l’occasion faisant le larron j’en profite aussi pour faire appel à l’opposition et à tous ceux qui aiment le peuple congolais qui ont déjà désigné leur acteur de le retirer. En tout cas de laisser la machine se bloquer tant qu’on n’aura pas trouvé une personne qui pourra nous garantir des élections libres et transparentes et apaisées.

Alpher Kalala, JRI

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