Sud-Kivu : la lenteur dans les processus judiciaires décourage les survivantes des viols d’aller en procès

En République démocratique du Congo, plusieurs survivantes des violences sexuelles ne trouvent pas réparation à cause de la lenteur de la justice. Nombreuses abandonnent les procès en cours ou se rabattent aux arrangements à l’amiable. Ce que dénoncent aussi les organisations de la société civile de Miti, une localité de la province du Sud-Kivu.

Miti est un groupement du territoire de Kabare situé à 25 kilomètres au Nord de la ville de Bukavu à l’Est de la République démocratique du Congo. Dans ce lieu, plusieurs cas de viols ont été commis depuis ces deux dernières années. Mais la lenteur du déroulement des procès des survivantes ont du mal à trouver réparation.

Depuis 3 ans, Albert, père d’une survivante, attend voir les violeurs de sa fille être condamnés. Ces derniers ont abusé de son enfant en 2019 à Chibinda, un village du groupement de Miti, près du Parc de Kahuzi.

« Ma fille a été violée par deux hommes de notre village alors qu’elle revenait d’une source pour chercher de l’eau », explique Albert.

“C’était aux environs de 18h, qu’elle a été surprise par ces deux garçons âgés d’environ vingt ans. Ils l’ont amené de force dans un champ d’eucalyptus et l’ont obligé de coucher avec eux tour à tour », nous révèle-t-il.

“Après le viol, ils ont fuis en lui menaçant de revenir si elle dénonçais. Ma fille avait reconnue l’un d’eux. A son arrivée à la maison, elle a informé sa maman de ce qui lui était arrivé. Nous sommes allés informer le chef du village et avec l’appui de la société civile, l’un des violeurs reconnu par ma fille a été arrêté et transféré au Tribunal de Kavumu. Mais jusqu’à ce jour, le procès n’a jamais connu sa fin, 3 ans après. Et le violeur n’a jamais été arrêté”, déplore le père de la survivante.

Le cas de la fille d’Albert n’est pas isolé, Fungulo Emmanuel, président de la société civile de Miti affirme que son organisation continue à enregistrer des cas de viols.

« Pour le seul mois de juin 2021 , nous avons enregistré au moins 6 cas de viols dans le groupement de Miti. Mais jusque-là les auteurs restent impunis malgré qu’on ait saisi la police », explique-t-il.

Pourtant, en République démocratique du Congo, la loi oblige les autorités judiciaires à traiter rapidement les dossiers de viol.

«…, l’enquête préliminaire en matière de violence sexuelle se fait dans un délai d’un mois maximum à partir de la saisine de l’autorité judiciaire. L’instruction et le prononcé du jugement se font dans un délai de trois mois maximum », précise l’article 7 bis du code de procédure pénale, La procédure est encore plus accélérée en cas de flagrance.

“ Aussitôt saisi du cas, la justice doit rapidement poursuivre l’auteur et le condamner. Plus le temps passe sans jugement, plus la survivante est traumatisée. Mais si le violeur est condamné à temps, cela aide à la survivante de se relever.”indique Jolly Kamuntu, présidente de l’organisation Karibu jeunesse nouvelle, KJN, une ONG des droits humains.

A Miti, l’autorité coutumière affirme accompagner les survivantes dans leurs procédures en justice. Mais, Charles Lushombo, secrétaire administratif du groupement de Miti, reconnaît la limite de son pouvoir une fois la question en justice.

« Nous transférons tous les cas qui nous sont signalés et qui sont confirmés par l’hôpital au parquet à Kavumu. C’est aux magistrats qu’il revient de poursuivre les auteurs», dit-t-il..

Tout en encourageant les survivantes à dénoncer les viols, il plaide pour que les autorités judiciaires accélèrent les dossiers liés aux viols. Cela, assure-t-il, permettra de décourager les violeurs et réhabiliter les victimes.

Juvénal Mutakato

Cet article a été produit en collaboration avec Journalistes pour les droits humains, JDH/JHR avec l’appui d’Affaires mondiales Canada

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