L’ancien président de la République démocratique du Congo, Joseph Kabila en exil volontaire en Afrique australe depuis plus d’une année, est rentré au pays par la ville de Goma (Nord-Kivu) depuis le dimanche 25 mai. Ce retour marque une réapparition politique après une longue période de silence. Si sa présence est perçue par Kinshasa comme un soutien au mouvement rebelle AFC/M23 qui occupe la ville depuis maintenant quatre mois, ses proches collaborateurs nient cela, soulignant que tout citoyen congolais est libre de faire tout mouvement sur l’ensemble du territoire national, comme c’est garanti par la constitution.
En effet, avant son arrivée dans la ville de Goma, Joseph Kabila s’est adressé à la nation la soirée du vendredi 23 mai, au lendemain de la levée de son immunité parlementaire au Sénat. Dans son discours, l’ex-président a peint un tableau « sombre » par rapport à la gestion actuelle du pays, explique Maitre Jean-Claude Zihalirwa, cadre du Parti du peuple pour la reconstruction et le développement (PPRD) Sud-Kivu, joint par notre rédaction.
Tout en vantant Joseph Kabila comme le pionnier de la démocratie en RDC, Jean-Claude Zihalirwa soutient que le régime démocratique autorise aux dirigés de dire ce qu’ils constatent de la gestion des autorités gouvernementales, et ce qu’à fait l’ancien président après avoir constaté une régression par rapport à sa gestion.
«Je ne pense pas que son Excellence Joseph Kabila ait chargé son successeur Félix Tshisekedi, par contre, il a peint un tableau qui déjà au regard de la situation actuelle du pays est sombre de lui-même. Donc c’est par rapport à la gestion actuelle du pays de son successeur qu’il a eu a formulé à la fois de critiques et de recommandations. Ce ne sont pas de charges, on charge plutôt sa gestion. En fait, la démocratie dont il est le pionnier a cela comme conséquence. Ce que, les citoyens, les dirigés sont autorisés de pouvoir critiqués, analysés, dire ce qu’ils voient et ce qu’ils constatent de la gestion des autorités gouvernementales; c’est très normal que lui tout en ayant été à la tête du pays, il constate qu’il y a eu une forte régression par rapport à où il a laissé le pays, et qu’il puisse se taire se serait à mon sens irresponsable,» a indiqué ce cadre du PPRD.
Retour de Joseph Kabila au pays par Goma
Me Jean-Claude Zihalirhwa dans cet entretien nous accordé confirme la présence de Kabala dans la ville de Goma. Sa présence dans cette ville ne symbolise autre chose que la matérialisation de sa recommandation dans son discours, invitant chacun à apporter sa contribution pour que la guerre cesse, mais aussi par compassion, il veut percevoir ce que traverse la population encombrée par la violence, précise notre source.
«Oui, il est vrai qu’il est à Goma (…), je ne vois pas l’obligation légale qui l’amènerait à aller dans une autre province pour son retour et ne pas à Goma ou ailleurs; d’autant plus la constitution et les lois de la République veulent que tout citoyen puisse entrer et sortir du pays quand ils veulent. Si on veut passer par Kasumbalesa, par Kinshasa, par l’Equateur, c’est un droit, tout dépend de l’agenda de chacun; à plus forte raison d’une autorité de ce rang! Il a dit qu’il voulait plutôt passer là pour une bonne raison, à l’Est nous sommes déjà encombré par la guerre et par compassion, il veut passer pour percevoir réellement ce que les citoyens vivent comme souffrance et si besoin, peut être prendre langue avec qui intervienne dans la guerre pour comprendre les tenants et les aboutissants de cette guerre et éventuellement apporté sa pierre, par ce qu’il a en même tant recommandé que chacun fasse sa partition pour que la paix revienne au pays, ».
Il rejette par ailleurs sa collaboration avec le M23, un mouvement rebelle qu’il a lui même diabolisé, combattu par le passé.
«Comment voulez-vous qu’il soit le chef d’une rébellion que lui-même a maté il y a une dizaine d’années? Parce qu’en 2012 lui-même a été à la tête du pays et le M23 a attaqué la RDC, et lui-même est celui qui l’a défait. Quand ils sont rentrés sur invitation des autorités actuelles, lui pourrait se retrouver comment comploter avec eux dès lors que déjà lui-même les avait combattu il y a quelques années? ça n’a pas de sens. Sa présence à Goma n’a aucun lien avec eux ! a insisté Jean-Claude Zihalirhwa.
Joseph Kabila, homme du passé
Réagissant à son discours, le porte-parole du gouvernement, Patrick Muyaya, a déclaré, dimanche 25 mai, que « le président Kabila est un homme du passé qui n’a absolument rien à proposer, ni dans le contexte actuel ni pour l’avenir,». Il réagissait à la sortie médiatique de l’ancien président de la RDC, Joseph Kabila, lors d’une émission diffusée sur la télévision nationale, RTNC.
Patrick Muyaya a affirmé que l’exécutif actuel travaille assidûment à résoudre les problèmes que Joseph Kabila, alors chef de l’État, n’avait pas su régler : « Le plus important pour nous, en tant que gouvernement, c’est de nous assurer que chaque jour, nous progressons, »
Pour rappel, dans une vidéo publiée sur YouTube, vendredi 23 mai, l’ancien chef de l’État, Joseph Kabila, s’est montré très critique envers le gouvernement en place. Il a dressé un tableau sombre de la situation en RDC, affirmant que le pays est « gravement malade et que son pronostic vital est engagé,» Joseph Kabila a dénoncé ce qu’il qualifie de « gouvernance non orthodoxe » sous le régime de Félix Tshisekedi.
Parmi les problèmes qu’il pointe du doigt figurent la corruption, le détournement des deniers publics, ainsi qu’une dérive autoritaire où, selon lui : « La volonté du Chef de l’État tient désormais lieu de loi suprême, supplantant la Constitution et les lois,». Enfin, l’ancien président a proposé un « pacte citoyen » articulé autour de douze points clés, visant, selon lui, à restaurer la stabilité, la démocratie et le développement en RDC.
Climat tendu
Ceci intervient dans un climat de tensions accrues sur le plan politique, marqué par la levée de l’immunité parlementaire de l’ancien présidant au Sénat, ouvrant ainsi la voie à de poursuites judicaires, également sur le plan sécuritaire, marqué par une intensification des violences dans la partie Est, en particulier entre le mouvement rebelle AFC-M23 et les forces armées congolaises et leurs alliés respectifs.
Juvénal MUTAKATO