RDC : Faute d’une loi spécifique, des survivantes des violences conjugales préfèrent la médiation que la justice.

En République Démocratique du Congo, les violences sexuelles sont produites sous ces différentes formes sur toute l’étendue du territoire national. Les violences conjugales qui font également partie des violences sexuelles sont commises par des hommes sur leurs épouses en majorité et en minorité par des femmes sur leurs époux. Des survivant(e)s de cette forme des violences optent pour la médiation que la justice.

C’est le cas de Blandine victime de la violence conjugale dans son foyer à Bukavu que nous avions rencontré qui avoue avoir dénoncé  en décembre 2020 après avoir encaissé cinq (5) ans de coups et blessures de son partenaire.

« J’avais peur et honte à la fois d’aller vers des inconnus et leur raconter mon histoire. Mais aussi, je n’avais que ma famille pour m’orienter sur quoi faire et comme vous le savez, le seul conseil qu’on pouvait me donner c’est de supporter au nom de l’amour qui nous uni et à cause des enfants. C’est après avoir eu mon 4ème enfant, qu’une collègue m’a conscientisé et j’ai décidé de briser le silence. Nous vivons mieux aujourd’hui avec mon mari, car l’association des femmes que mon amie m’a conseillé de voir, nous a beaucoup aidé à travers des conseils », nous a narré une  Blandine, victime des violences conjugales.

Selon elle, l’idée d’aller à la justice l’avait traversé l’esprit mais après avoir eu des conseils elle a jugé bon de laisser tomber et de continuer à vivre dans la paix avec son conjoint.

Selon les estimations mondiales de l’OMS, 35% des femmes, soit près d’1 femme sur 3, indiquent avoir été exposées à des violences physiques ou sexuelles de la part de leur partenaire intime ou de quelqu’un d’autre au cours de leur vie.

En RDC, certaines femmes arrivent à briser le silence et à dénoncer ces cas auprès des organisations qui défendent les droits des femmes ou à la justice pour des cas extrêmes, indique Georgette Nkunzi responsable de la Dynamique Femme et Enfant.

Elle estime qu’au-delà du mythe autour du mariage et des coutumes qui freinent les femmes à dénoncer les violences qu’elles subissent,  il y a aussi un problème sur le droit à évoquer.

« Pour dénoncer un problème, il faut d’abord savoir si c’en est un. Départ  nos coutumes, la femme ne doit pas quitter son ménage et pire encore dire ce qui se passe en secret chez elle. Elle peut avoir des coups le soir et le matin elle dira qu’elle a trébuché. Le mythe du mariage veut que la femme supporte tout. Mais aussi, d’autres femmes ignorent le droit. Elles ne savent pas que dit le code de la famille ou que dit la loi sur les violences sexuelles. C’est pourquoi je pense que plusieurs sensibilisations doivent être faites dans ce sens afin que les femmes aient connaissance de leur droit», explique Georgette Nkuzi.

La cheffe de Division Genre, Famille et Enfant souligne que son service enregistre plusieurs cas de violences conjugales. Certaines sont résolues par des médiations et d’autres vont se résoudre à la barre.

Selon Jacqueline Ngengele, le dernier cas en date s’est produit il y a pas plus de deux (2) mois. Une jeune femme en état de grossesse, a succombé de suite des coups reçus de la part de son conjoint. Le dossier est actuellement au parquet.

Notre source indique que la division du genre, famille et enfant n’est pas là pour séparer les couples mais pour les aider à rester ensemble dans le respect mutuel.

« Notre grande stratégie est résumé par des conseils et des médiations des couples en conflit. Faire recours à la force ou à la justice ce n’est qu’en dernier lieu. Mais comme vous le savez, les histoires des couples sont très complexes et il faut à tout prix y aller avec prudence. Dans un foyer, il y a plusieurs choses à surmonter car tous les jours ne sont pas roses mais il faut juste savoir comment y aller avec douceur» a renchérit Jacqueline Ngengele.

Me Amato Ntabaza, de l’UEFA, une ONG locale qui travaille également dans la lutte contre les violences sexuelles, estime que particulariser les violences conjugales avec ses propres pénalités est un niveau élevé qui ne pourrait être possible que par la détermination des femmes. Une fois qu’il y aura une loi spécifique, les femmes cesseront de recourir à la médiation en privilégiant la justice.

« Une loi spécifique sur les violences conjugales devra être un niveau élevé des femmes à l’autodétermination, car nombreuses ne sont pas encore prêtes à briser le silence sur la chosification dans les rapports conjugaux, les tortures et autres formes de violences dont elles sont victimes. Mais, une loi spécifique pourrait également restreindre les droits des hommes qui pensent qu’avoir tous les droits sur la femme implique aussi de la battre et/ou de la violer », pense Me Amato Ntabaza.

Esther Kanga

Cet article a été produit en collaboration avec Journalistes pour les droits humains, JDH/JHR avec l’appui d’Affaires mondiales Canada.

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