Sud-Kivu: L’impunité : l’une des pesanteurs à la base de persistance des violences sexuelles en territoire de Fizi

L’absence des châtiments sévères des violeurs et des arrangements à l’amiable favorisent la persistance des violences sexuelles à l’endroit des filles et femmes dans le territoire de Fizi au Sud-Kivu. Dans ce coin de la province du Sud-Kivu situé dans la partie Est de la République démocratique du Congo, la Nouvelle dynamique de la société civile affirme avoir documenté 10 cas pour une courte période selon Norbert Munga, vice-président de la Nouvelle dynamique de la société civile dans ce milieu.

Pour la Nouvelle dynamique de la société civile, l’impunité des cas des violences sexuelles et basées sur le genre est à la base de l’accroissement des cas à Fizi.

« Au départ, nous avons enregistré 3 cas de viols à Fizi. Ces cas ont été soldés par des arrangements à l’amiable. A cause du manque de punitions de ces forfaits, cela a fait que 7 nouveaux cas ont été notifiés. Ce qui fait au total 10 cas de violences sexuelles dans un espace allant du  18 février au 15 mars dernier. Cette impunité a favorisé la multiplicité des actes de viols », dénonce Norbert Munga.

Bien que l’article 9bis  la loi de 2006 sur les violences sexuelles en RDC n’autorise pas la pratique des amendes transactionnelles en matière des violences sexuelles pour mettre fin au dossier de viol par le paiement d’une somme d’argent, des survivantes qui dénoncent des cas à la justice se découragent de voir leurs bourreaux libres.

Tel est le cas pour Madame Chance, nom d’emprunt, survivante de viol en 2021 par un homme de son village. Elle explique son cas:

« Un soir, je revenais du marché quand il pleuvait. Je suis allée m’abriter dans un chantier en construction au bord de la route. Il y avait quelqu’un, un homme que je connais car de mon village. Il y avait une forte pluie, et soudain, j’ai senti une main me saisir au cou avec violence et me jeter par terre. J’ai crié mais personne n’avait entendu ma voix à cause de la pluie. J’ai essayé de lui résister, mais c’était en vain parce qu’il était sur moi, c’est ainsi que j’ai été violée », témoigne-t-elle avec des larmes aux yeux.

Ayant fait part de son calvaire à son mari, Madame Chance fait savoir avoir traduit en justice son violeur qui avait été arrêté. Mais grande fut sa surprise lorsqu’elle a appris la libération de  son bourreau, un mois plus tard. Cherchant à en savoir plus, elle apprendra qu’il avait été libéré après paiement d’une amende.

Pour Madame Eliane Polepole, chargée de programme de l’Association des femmes des médias, AFEM, une organisation qui milite pour la promotion des droits des femmes. C’est déplorable que les violences sexuelles persistent faute des sanctions exemplaires à l’endroit des auteurs de ces actes ignobles contre la personne de la femme,  malgré tout l’arsenal juridique congolais.

« Nous sommes très indignées par cette situation où des cas de viols sont enregistrés malgré qu’il y a soit libération du bourreau ou soit le dossier reste sans suite. Pourtant notre pays dispose d’un arsenal juridique qui protège les survivantes de toutes sortes. Ces violences portent atteinte à l’intégrité physique et morale de la personne. Et sont le plus souvent commises dans l’intention d’humilier ou même de déshumaniser la femme », s’indigne-t-elle.

Madame Polepole poursuit en disant que les traumatismes causés par les violences sexuelles perturbent la vie des survivantes qui ont du mal à vivre normalement leur quotidien avec leur famille ou au travail.

A part l’impunité des cas des viols et la pratique des arrangements à l’amiable, il y a aussi l’ignorance des lois du pays par les survivantes des VSBG. De fois, elles ne savent pas comment contourner un obstacle comme en cas de libération d’un bourreau après paiement d’une somme, une pratique à dénoncer car contre la loi en matière de viol.

Pour sa part, Maître Zozo Sakali, avocat au barreau de Bukavu, la prescription est de droit commun même pour le cas de viol. Les victimes doivent dénoncer afin que leurs bourreaux  subissent la rigueur de la loi. Les familles des survivantes doivent les accompagner et approcher les organisations de défense de droits des humains pour solliciter de l’accompagnement en cas de besoin.

« D’après l’article 42 bis du code pénal congolais, les infractions relatives aux violences sexuelles sont imprescriptibles et ne peuvent en aucun cas être exonérées de la responsabilité pénale, ni constituer un objet de diminution de peine. Tout tribunal se fonde sur des faits, lorsqu’il y a des faits, il y a viol, pour que la justice fasse son travail les victimes doivent dénoncer les violeurs pour qu’ils soient punis. Les survivantes doivent mettre une barrière aux pratiques qui consistent à libérer les bourreaux après paiement d’une somme. Elles doivent dénoncer ces genres de pratiques ».

En réaction, la commissaire générale provinciale du Genre, Famille et Enfant, Madame Kinja Mwendanga  fait savoir que son service ne ménage aucun effort pour accompagner des survivantes des violences sexuelles. Elle promet de renforcer la sensibilisation et le plaidoyer pour que soit mis fin à des arrangements à l’amiable en matière de viol ainsi que l’ignorance par les victimes de leurs droits.

Martial Alpher Kalala, JDH

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