Me JP Lumbulumbu sur la machine à voter: “La manipulation des données informatiques n’offre aucune garantie de transparence”

À quatre mois des élections générales en Rdc, la sempiternelle question de la machine à voter revient sur la sellette.

Pendant que la Centrale Electorale sensibilise sur cet outil, l’opposition politique le récuse.

Le cas de l’opposant congolais Me Jean-Paul Lumbulumbu. Joint ce mercredi matin par nos fins limiers, il brosse ici dans les colonnes du Journal Jambordc.info, les quatre raisons pour lesquelles il s’oppose farouchement à la machine à voter.

D’entrée de jeu, il estime qu’en imposant la machine à voter, la CENI viole un acte réglementaire, sa décision.

L’article 23 quinquies de la loi organique n° 13/012 du 19 avril 2013 modifiant et complétant la loi organique n° 10/013 du 28 juillet 2010 portant organisation et fonctionnement de la CENI élève le Président de cette institution d’appui à la démocratie au rang de Ministre National.
Si les ministres membres du Gouvernement agissent par voie d’arrêté ministériel, le Président de la CENI, lui, agit par Décision.
Les arrêtés ministériels, tout autant que les décisions notamment celles prises par le Président de la CENI, sont des actes réglementaires, des lois au sens large du terme, c’est pourquoi ils sont opposables à tous au même titre les actes législatifs“, révèle-t-il.

La deuxième raison que cet opposant avance est relative à la décision n°065/CENI/BUR/17 du 05 Novembre 2017(Calendrier électoral des élections du 23-12-2018).

Selon lui, les points 38,39 et 40 prévoient respectivement les préparatifs techniques de l’impression des bulletins, des procès verbaux et des fiches des résultats. Notamment l’impression, le conditionnement et la livraison aux 15 hubs, des bulletins de vote, des procès verbaux et des fiches des résultats, déploiement des bulletins de vote, procès verbaux et fiches des résultats vers les sites de formation.

La décision n°065/CENI/BUR/17 du 05 Novembre 2017 ne prévoit nulle part, ni la commande, ni le déploiement dans les centres de formation, ni l’usage d’une quelconque machine à voter. Il appert donc que la CENI violera la loi, sa propre loi, en faisant usage d’un outil (la machine à voter) qui n’est nullement prévu dans sa propre décision portant calendrier électoral des élections du 23-12-2018″, confie Me Lumbulumbu, avant de renchérir: “Ce dernier ayant plutôt prévu l’usage des bulletins de vote et non d’une machine à voter, cette dernière et son usage sont illégaux”.

Une autre raison avancée par le Numéro Un du Pld, Parti Libéral pour le Développement est la suivante. En imposant la machine à voter, la CENI viole la loi électorale, selon lui.

“Par la machine à voter, le vote se fait en utilisant un ordinateur dont la maitrise échappe à la quasi majorité des électeurs Congolais, surtout dans les milieux ruraux. L’électeur doit savoir manipuler, seul ou accompagné, un outil informatique par son doigt. Le vote se fait donc au moyen d’un ordinateur. Pourtant, l’article 47 de la loi électorale limite à deux les moyens par lesquels s’effectue le vote : il s’agit du vote soit au moyen d’un bulletin papier, soit par voie électronique. Cette loi n’évoque nulle part la machine à voter comme moyen de vote. Dès lors, son usage violera la loi électorale faute d’avoir été expressément prévue par elle”, soutient-il dur comme fer.

Et puis, l’usage de la machine à voter viole le secret de vote, un principe clé des élections, si l’on en croit ses propos.

L’article 57 de la loi électorale précise qu’après avoir reçu le bulletin paraphé par le Président au moment de sa remise, l’électeur se rend dans l’isoloir. Il s’y rend seul pour opérer librement le choix en toute sécurité et discrétion. Seul dans l’isoloir, combien des Congolais sont en mesure d’utiliser cet outil informatique conçu exclusivement en français. Nos mères, nos frères et nos sœurs dans nos villages qui n’ont jamais manipulé un simple téléphone, sauront-ils, seuls dans l’isoloir, manipuler la machine à voter. Par l’usage de la machine à voter, l’électeur non initié au maniement de l’ordinateur est admis à se faire assister lors du vote une personne son choix. Le caractère secret du vote est, dès lors, violé. Pire, un risque de détournement du vote par l’assistant est à craindre”, argumente le jeune avocat Lumbulumbu.

En définitive, le président national du Pld ne voit aucune garantie de transparence lors de la transmission des résultats de vote.

Si dans les bureaux de vote, une forte présence des témoins et observateurs nationaux et internationaux peut avoir un effet dissuasif d’une tricherie ou des irrégularités, lors de la transmission(par internet) des résultats issus des bureaux de vote vers les CLC(Centres Locaux de Compilation), et des CLC vers les centres(Provincial ou national) où le fameux seuil de représentativité(3% au niveau provincial et 1% au niveau national) seront déterminés, aucune garantie légale de la transparence. La présence des témoins et observateurs n’est légalement garanties que dans les bureaux de vote et les centres locaux de compilation”, explique-t-il avant de poser une série d’interrogation :
“Qui calculera le seuil de représentativité ? Quelle garantie de transparence que les chiffres issus des différents CLC seront honnêtement repris pour le calcul du seuil de représentativité? Qui seront témoins lors du calcul du seuil de représentativité? “

Pour Lumbulumbu, la loi électorale ne donne aucune réponse à toutes ces questions.

“La manipulation des données informatiques issues de la machine à voter par les agents de la CENI n’offre aucune garantie de transparence à l’absence des candidats, de leurs témoins et des observateurs électoraux surtout au niveau du centre national de compilation pour le calcul du seuil de représentativité”, conclut-il.

Eugide Abalawi Ndabelnze

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